Maintenance en zone ATEX: ouverture d’un réacteur/d’une cuve
Mai 2020
La maintenance en zone ATEX est un sujet d’actualité dans l’industrie depuis de nombreuses années. Les opérations de maintenance nécessitant l’ouverture d’une capacité contenant un liquide inflammable présentent un risque élevé d’explosion. Ce type d’opération est par exemple le remplacement d’une pompe verticale (voir Image 1) ou d’un agitateur (voir Image 2) sur une cuve ou un réacteur. Cette newsletter présente les dangers et les mesures de sécurité possibles dans ce contexte. Les risques liés à la toxicité des substances chimiques ne seront pas considérés ici.
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Image 1 : Exemples de pompes verticales sur une cuve
Image 2 : Exemple d’un agitateur sur un réacteur
Lors de la définition des zones ATEX, les atmosphères explosives générées par les opérations de maintenance peu fréquentes ne sont en général pas considérées. La possibilité d’une explosion doit toutefois être attentivement évaluée en raison de l’ouverture des équipements. Le risque pendant les opérations de maintenance est généralement couvert par un permis de travail et doit être examiné plus en détail par une analyse de risque. Cette newsletter se veut un point de départ utile pour aider à évaluer les risques pertinents et les éventuels facteurs influençant la production.
Les paragraphes ci-dessous décrivent plusieurs possibilités et conseils pour les opérations de maintenance en utilisant l'exemple du remplacement d'une pompe ou d'un agitateur sur une cuve ou un réacteur contenant un liquide inflammable. Ces opérations ont en commun de nécessiter l’ouverture de la capacité pour leur réalisation.
Eviter la génération d’une atmosphère explosible
Vidange de l’équipement
Si une capacité contenant un liquide inflammable doit être ouverte pour des raisons de maintenance, la façon la plus sûre de procéder est de la vider et de la nettoyer complètement pour la mettre à disposition, c’est-à-dire de s’assurer de l’absence de substances chimiques à l’intérieur avant de l’ouvrir.
Toutefois, de faibles quantités de solvants, par exemple adsorbées sur les parois ou dans les revêtements, peuvent se vaporiser lentement et générer une atmosphère explosive. En particulier, les solvants non-miscibles avec l’eau (disulfure de carbone, toluène, hexane, etc.) n’ayant pu été lavés efficacement, présentent un risque accru.
De plus, la vidange complète et mise à disposition d'un réservoir peut avoir un impact majeur sur la production et dans certains cas se révéler impossible en raison de pertes de production importantes ou de perturbations massives dans un système interconnecté.
Inertage
Deux aspects rendent difficile l’inertage d’un système pendant des opérations de maintenance :
1. Durant les opérations, les équipements sont par définition des systèmes ouverts, rendant l’inertage inefficace en raison de la diffusion des gaz et de l’effet de la respiration du réacteur ou de la cuve
2. Les gaz d’inertage sortant de la capacité peuvent réduire le taux d’oxygène dans des zones proches en présence de personnel non-protégé, générant un risque additionnel d’anoxie.
Inertage à l’argon
Inerter un réservoir avec de l’argon est une solution rarement mise en œuvre dans l’industrie qui présente cependant un avantage certain : l’argon est plus lourd que l’air et agit comme une couverture à la surface des liquides. Les problèmes liés à l’argon sont un cout relativement élevé, la nécessité de stocker des bouteilles ou des cadres de bouteilles et souvent le manque d’expérience des équipes de production et de maintenance par rapport à son utilisation.
Inertage à l’azote
L’azote est généralement disponible comme gaz d’inertage sur les sites et coûte significativement moins cher que de l’argon. Cependant, lorsque le réacteur ou la cuve est ouvert, la durée de l'inertage à l’azote est fortement réduite par rapport à un inertage à l'argon.
Le graphique ci-dessous (Image 3) présente un essai réalisé dans une sphère de 20 litres inertée avec de l’argon ou de l’azote. La partie supérieure de la sphère a été ouverte et l’évolution de la concentration en oxygène a été mesurée en partie inférieure de la sphère. Pour la plupart des liquides inflammables généralement utilisés, atteindre 10 % d'oxygène signifie que la valeur de la concentration limite en oxygène (CLO) est dépassée, ce qui entraîne la formation d'un mélange explosif. Dans l’expérience présentée, la concentration limite en oxygène au fond de la sphère a été dépassée en 105 secondes pour l’inertage à l’azote, alors que pour l’argon, l’augmentation de la concentration d’oxygène au-delà du seuil critique a duré environ 100 minutes. L’inertage à l’argon dans cet exemple est 50 fois plus durable que celui à l’azote.
Note : Les 10% sont choisis arbitrairement à des fins de démonstration. Pour chaque système physique, le temps nécessaire pour atteindre une concentration d'oxygène pertinente pour la sécurité sera différent, en fonction de son facteur de forme, de sa taille et de son environnement.
Image 3 : Entrée d’oxygène dans la sphère de 20L préalablement inertée en min après l’ouverture de la partie supérieure de la sphère
Effets liés à la respiration de la capacité
Le soutirage de liquide dans une capacité ouverte en partie haute a pour conséquence l’introduction d'oxygène atmosphérique et donc la dilution du gaz inerte, soit une diminution de l’efficacité de l’inertage. Une situation similaire se produit lorsque des liquides sont pompés dans la capacité : le niveau du liquide monte, rapprochant la surface du liquide de l'ouverture du réservoir et donc de l'atmosphère extérieure, accélérant la perte de l’inertage par des effets de diffusion des gaz. En conséquence, les transferts de liquide, et donc toute production interconnectée, doivent être interrompus pendant les opérations de maintenance.
Dans de nombreux cas, les méthodes d’inertage à l’azote ou à l’argon ne sont pas suffisamment fiables pour les raisons mentionnées précédemment, et ne permettent donc pas les opérations de maintenance impliquant des personnes et/ou des sources d’inflammation. Cependant, dans des situations particulières ou en combinaison avec des mesures additionnelles, les méthodes suivantes peuvent réduire le risque à un niveau acceptable.
Ventilation
La ventilation constitue un choix intéressant afin d’éviter l’apparition d’atmosphères explosives à l’extérieur des capacités concernées. L’extraction des gaz et vapeurs avec des ventilateurs temporaires est très efficace si les points suivants sont pris en compte :
1. L’extraction doit se faire directement à l’ouverture de la capacité (extraction à la source). En effet, l’extraction de vapeurs et gaz n’est effective qu’à une distance environ égale au diamètre de la gaine d’aspiration.
2. La densité des gaz et vapeurs doit être prise en compte lors du positionnement de l’unité d’extraction. Pour la plupart des vapeurs organiques, l’extraction doit se situer légèrement sous l’ouverture de la capacité ou près du sol.
Modification du design : remplacement des pompes verticales
Le choix d’un design adapté et d’équipements à faible maintenance permet d’anticiper les opérations de réparation et de maintenance, ainsi que d'éviter des coûts élevés pour une sécurité supplémentaire ou un arrêt de production excessif. Dans cet exemple, une modification intéressante du design pourrait être de remplacer les pompes verticales par des pompes horizontales. Cette solution ne nécessite pas l'ouverture du sommet du réacteur pour les travaux de maintenance ou de réparation de la pompe. En outre, les pompes horizontales sont plus faciles à isoler et à remplacer, ce qui réduit l'impact à long terme sur la production.
En résumé
Les mesures de sécurité liées aux opérations de maintenance en zones ATEX doivent être décrites et analysées et dans le cadre d’un système de permis de travail formalisé.
Mesures possibles pour l’ouverture d’une capacité contenant un liquide inflammable :
- vidange et nettoyage complet ;
- inertage temporaire ;
- ventilation/extraction de vapeurs temporaire ;
- surveillance permanente de la concentration en vapeurs inflammables et en oxygène.
Si vous souhaitez en savoir plus sur les solutions existantes pour des problèmes ATEX spécifiques, n’hésitez pas à contacter l'auteur de cet article :
Contact : Kurt Verheyden
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